À LA VIE, À L'AMOUR
Aussitôt que l’on naît, le temps est déclenché ;
La vie court à sa fin, à peine commencée ;
Et le compte à rebours qui mesure les ans
Cessera bien un jour, on ne sait où ni quand.
Mais faut-il pour autant toujours s’en émouvoir ?
Il faut bien séparer la tourmente et l’espoir
Pour ne point s’égarer, pour ne point se tromper ;
L’Essentiel n’est pas dans la matérialité.
Or tout homme, ici-bas, pense bien le contraire ;
Mais ça n’est pas la Voie, il faut faire marche arrière ;
Car la pure Vérité n’a jamais concerné
Superficialité, horizontalité.
Ce qui compte est ce qui ne peut pas se compter ;
Ce qui pèse est ce qui ne peut pas se peser.
La véritable Vie ne peut se mesurer
Qu’à l’aune de l’Amour dans son infinité.
Il suffit, pour cela, d’ouvrir tout grand son cœur
Qui, une fois béant, fait grand’ place au bonheur,
Et laisser le cerveau, simple subordonné,
Qui mélange et dérange et vient tout compliquer.
Car c’est lui qui nous donne une idée de la fin,
Lui qui croit tout connaître et qui ne connaît rien !
Rien au sens de la Vie car ses petits moyens
Trop courts et limités lui en barrent le chemin.
Sinon, comment ferait ce petit vieux ridé
Pour encore nous sourire de sa bouche édentée
Et transmettre à nos cœurs cette vive lueur
Par le biais de son œil usé mais bien moqueur ?
Et cette vieille dame, assise et tremblotante,
Qui d’un revers de main, pour rester élégante,
Remet, tant bien que mal, la mèche de cheveux
Relevée par le vent dans son jeu facétieux ?
Comment font ces humains si proches du grand soir
Pour tant nous attendrir, pour tant nous émouvoir ?
Ils n’entendent plus bien, ne voient presque plus rien,
Et ne savent parler, souvent, qu’avec leurs mains…
Ils ne peuvent penser, ils ne peuvent qu’aimer ;
C’est le plus important qu’ils ont pu conserver,
Car les ans ont passé en causant leur outrage,
Offrant à nos regards une bien triste image.
A nos yeux seulement ! Car si l’œil de nos cœurs
Se met à observer cet étrange malheur,
Il pourra découvrir, avec enchantement,
Que la vie brille encore, bien au delà des ans…
Au loin, le désespoir ! Au loin, les cœurs trop lourds !
Car l’amour de la mort est la mort de l’Amour
Et la vie de l’Amour est l’amour de la Vie
Qui commence un beau jour, et jamais ne finit…
Robert FAUCHER, le 21 août 2004.