CES ÉNORMES PETITS RIENS...
Avez-vous remarqué comme un rien peut compter ?
Deux fois rien est aussi dans la même lignée ;
Trois fois rien signifie que c’est bien peu de choses ;
Presque rien veut bien dire une petite dose.
Et alors… ? Direz-vous, on est bien avancé… !
Et alors… ? Répondrai-je, vous n’avez pas noté
Que dans ces petits riens, la vie, de ses secrets,
Voile la vérité à l’œil un peu distrait ?
Suivez-moi… !. Ecoutez…! Observons en silence
Ce que Dame Nature tait au commun des sens.
Vous allez pénétrer le monde des détails
Nombreux et bien gardés, telles femmes au sérail.
Sitôt le seuil franchi, par l’embarras le choix
Se trouve courtisé comme un prince ou un roi.
Car tout possède en soi des facettes ténues
Qui ne peuvent briller que vues par le menu.
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, à l’unisson
De l’immense beauté d’un grain du même nom,
Posé sur une épaule, à l’abri des regards,
Et qui fut découvert par le fruit du hasard ?
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, devant un cou
Qui servait d’écrin blanc à ce petit bijou,
Ce duvet de cheveux, s’étant allé cacher
Sous un col qui a su, un instant, s’écarter ?
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, dans un vieux train,
Devant la vie si brève d’une miette de pain,
Tressautant sur le bord d’une fenêtre ouverte
Et que les vibrations acculaient à sa perte ?
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, en regardant,
La tache maculant un beau livre d’enfant,
Se disant qu’elle avait elle aussi une histoire
Comme lui, comme nous, qu’on aimerait savoir ?
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, quand il pleuvait,
Sur une goutte de pluie qui, lentement, glissait
Jusqu’au bout de la feuille qui l’avait hébergée
Juste le temps de naître et puis de succomber ?
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, sur la fossette
Qu’un bébé découvrait après chaque risette
Dont il nous gratifiait en étant endormi
Et qu’on imaginait couché au Paradis ?
Quel cœur n’a pas vibré, un jour, tout désolé,
En découvrant qu’il ne pourra jamais cerner
Le monde et ses détails avec deux pauvres yeux
Et bien trop peu de temps avant d’aller aux cieux ?
Mais les cœurs vibreront, toujours, émerveillés,
Tant qu’ils auront la joie et la curiosité
De regarder la Vie par ses petits côtés,
Les plus petits qui soient, et qui nous font rêver…
Robert FAUCHER, le 17 décembre 2004.