LE MONDE DE LA NUIT

Quand le puissant soleil est contraint d’abdiquer,

Quand les moindres lueurs sont drapées de pastel,

Quand le jour va mourir, sacrifié sur l’autel,

                   La nuit peut se lever.

Quand la vue de nos yeux a perdu l’acuité,

Quand la vie ralentie devient théâtre d’ombres,

Quand le monde immobile n’est plus que masses sombres,

                   La nuit a commencé.

Quand les bruits et les sons semblent s’être comptés,

Quand on les dirait tout droit venus du néant,

Quand ils percent l’obscur comme un sifflet strident,

                   La nuit est avancée.

Quand, au clair de la lune, tout devient argenté,

Quand tout reluit d’un bel et simple éclat blafard,

Quand tout devient magie et qu’il fait vraiment tard,

                   La nuit est magnifiée.

Quand, parmi les éclairs, le tonnerre vient gronder,

Quand la nature exulte en ce monde endormi,

Quand on se sent petit devant cet infini,

                   La nuit est agitée.

Quand les doigts de la main ont les yeux remplacés,

Quand la loi des possibles est devenue réelle,

Quand cette profondeur nous paraît immortelle,

                   La nuit est satinée.

Quand ton corps, sans remords, s’offre tout dénudé,

Quand tes tout petits cris sont mes seuls éclaireurs,

Quand le noir absolu devient le vrai bonheur,

                   La nuit est enchantée...

Robert FAUCHER, le14 décembre 2004.