LA VIEILLE PROSTITUÉE
Elle vivait seul’ dans son appartement
Avec son chien pour unique parent.
C’est difficil’ d’habiter sous les toits
Mais c’est ainsi quand on n’a pas le choix.
Elle travaillait sur un bout de trottoir
Dans une rue, quand il fait vraiment noir,
Car ses vingt ans l’avaient abandonnée
Depuis déjà de nombreuses années.
Et c’est sous la lumière tamisée
D’un vieux bistrot, éclairant la chaussée,
Qu’ell’ proposait à quelque vieux rôdeur
De l’emmener à l’hôtel du bonheur.
Et dans la chambre puante et humide,
Elle s’efforçait de camoufler ses rides
En demeurant le plus longtemps de dos ;
Elle en pleurait, elle avait le cœur gros…
On lui donnait de moins en moins de sous
Pour s’allonger ou se mettre à genoux,
Mais elle faisait, malgré tout, comme il faut
Pour satisfaire au mieux les libidos.
Elle ne pouvait supporter la détresse ;
Pour la combattre, elle n’avait que ses fesses…
Elle s’en servait pour vider le trop plein
Des hommes avides en quelques coups de reins.
Avec le peu qu’elle avait soutiré,
Elle allait vite acheter à manger
Aux mendiants les plus nécessiteux
Afin qu’ils aient le ventre un peu moins creux.
Elle leur chantait de très jolies chansons
Qui résonnaient, la nuit, sous les néons…
Elle leur payait aussi un coup à boire
Qui leur ôtait un peu de désespoir…
Et tous les jours, elle occupait ses nuits
A satisfaire toutes sortes d’envies,
Ce qui lui procurait son seul argent
Sans jamais l’once d’un remerciement.
Son cœur, son âme, étaient d’une beauté
Que bien des gens auraient pu admirer.
Depuis longtemps, elle vendait de l’amour
Sans jamais l’avoir rencontré un jour…
Mais elle continuait à bien chanter,
A bien aider tous les infortunés
Qui lui disaient merci à leur façon,
En un sourire dont ils lui faisaient don.
Et puis un jour, elle a quitté la vie.
On n’a plus entendu chanter la nuit…
On ne l’a plus revue sur le trottoir
Et dans sa rue, il fait encore plus noir…
Pour l’emmener à sa dernière demeure,
Il n’y avait que des gens de valeur :
Les mendiants les plus déshérités
Et puis son chien, qu’elle avait tant aimé…
Robert FAUCHER, le 30 décembre 2005.