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Les synthèses de Robert

Synthèse de Bons Mots Relatifs au Vin (I/)

 

moines buvant

 

 

QUELQUES PROPOS INTRODUCTIFS

 

 

Aucune substance consommable n'a la même complicité avec la PAROLE que le VIN car, non seulement il délie les langues en rendant les buveurs bavards ou poètes , selon leur talent, mais il est aussi le seul produit dont la consommation exige un commentaire, car savoir le BOIRE revient à savoir en PARLER.

Cet assemblage "de moût et de mots" fait du vin une boisson éminemment culturelle qui encourage l'élocution jusqu'à la griserie mais la brouille à partir de l'ivrognerie : au dialogue amical bien articulé fait alors place le monologue pathétique bredouillé.

Un piètre vin est triste et muet ; comme il n'a rien à dire, nous n'avons rien à dire non plus, alors qu'un vin enchanteur a beaucoup de choses sur le coeur qu'il suffit de savoir et vouloir écouter pour les dire : l'amateur est alors un interprète qui n'a qu'un petit rôle puisqu'il ne fait que traduire ce que le vin lui narre, c'est donc bien lui l'acteur principal. Bon nombre de gourmets se sentent bien souvent des âmes de "confesseurs de bouteilles" comme on disait au XVème siècle. Tout le "savoir" du connaisseur consiste à mettre en harmonie la bouche qui goûte et la bouche qui parle.

L'étymologie ne vient-elle pas éclairer notre lanterne en nous faisant découvrir que le mot "savoir"  vient du latin "sapere" qui signifie "avoir de la saveur, du goût, du parfum" ? Et l'on ne peut compter que sur l'argot pour nous rappeler les sources sensorielles de la connaissance dans l'expression riche de sens et d'histoire : "Etre au parfum". C'est peut-être pour cette raison que de nos jours on supprime l'enseignement du latin pour être en "harmonie" avec de nouvelles moeurs et habitudes de se nourrir : il est vrai que pour "déguster" les produits des fast foods, il n'est nul besoin d'avoir recours au "savoir", ni au "sapere", ni "à la saveur, au goût et au parfum".

Pourtant, les sensations du goût sont très limitées puisqu'elles ne sont qu'au nombre de quatre : le salé, le sucré, l'acide et l'amer ; mais la bouche est le siège de perceptions bien plus complexes, qu'elles soient tactiles : piquant, astringent, moelleux... ; thermiques : chaud, froid ; et surtout olfactives avec la perception des odeurs par voie rétro-nasales. Or, l'odorat est d'une sensibilité si fine qu'il peut percevoir des milliers d'odeurs, mais aucune langue ne dispose d'un inventaire lexical suffisant pour traduire toutes ces sensations.

On a oublié que certains mots, toujours utilisés actuellement, sont issus tout droit de l'oenologie latine, tels : acerbe, austère, sève... Et il ne faut surtout pas oublier qu'en plus de leur sens, les mots ont une saveur : c'est bien ce qui leur permet de rejoindre le vin car ils disposent d'une composante commune et fondamentale. C'est pourquoi les amateurs de vins sont très souvent des amateurs de la langue et réciproquement.

Le buveur et le dégustateur emploient souvent les mêmes mots mais, alors que le premier ne parle que de lui-même, de sa soif, de son état d'enivrement, le second ne parle que du vin. Parmi les termes les plus anciens légués par la médecine antique, ceux de chaud, froid, sec et humide fondaient une classification des substances aussi bien que des états physiologiques, et se sont retrouvés dans un grand nombre d'expressions populaires et l'argot, cité plus haut, apporte sa pierre à l'édifice desdites expressions assises sur le vin. Pour s'en convaincre, il suffira de compatir avec le buveur pour qui la "sécheresse est le martyre du gosier" et s'il en subit constamment les méfaits, c'est parce qu'il a été "baptisé avec une queue de morue" ou "vacciné au salpêtre", et c'est bien pour cela qu'il a sans cesse le "bec salé" ; il ne peut donc étancher sa soif qu'en buvant "cul- sec". Mais il le fait, tendrement comme un bébé puisqu'il "biberonne", "suce" et "tète". Les expressions "de la soif et du boire" en font l'élément humide par excellence et LA boisson première. Lorsqu'on dit de quelqu'un : "Il boit", ou : "Il est porté sur la boisson", à qui viendrait l'idée saugrenue de penser que l'on fait référence à l'eau ? A personne. Le soiffard n'aspire-t-il pas à se déshydrater, s'humecter, se mouiller, se rincer, s'arroser...d'un vin ainsi réduit à sa seule qualité de liquide ? Mais dans un temps ultérieur, on passe du chaud au froid puisque l'abus d'alcool va provoquer l'échauffement de l'ivresse et le soiffard va alors être allumé, cramé, aura chaud aux oreilles... il aura alors sa "cuite"  et pourra alors "cuver" en passant au froid puisqu'il sera devenu éteint,givré, gelé... L'ivrogne ne déguste pas, il boit à profusion jusqu'à finir "rond", "plein" ou "bourré". Il perd son humanité en finissant en objet : une "outre", un "sac à vin" ou un "tonneau" : il est alors "saoul jusqu'aux yeux avec les dents du fond qui baignent".

Il existe donc entre l'homme et la boisson alcoolique une relation ambiguë de violence et d'amour. Nombre d'expressions décrivent, en effet, la consommation du vin comme une guerre. Le soiffard commence par sortir "l'artillerie" que sont les verres et la bouteille, pour pouvoir boire des "coups", si possible rapprochés, donc en "rafales" et à force de boire des "canons" et de laisser des "cadavres" derrière lui, il finit "fusillé" , "cassé", "pété", "démoli"... par son "ennemi". Le dégustateur, lui, s'exprime en termes anthropomorphiques ; pour lui, le vin est "jeune, mûr, vieux ou sénile" ;il est doté d'un "corps", il a de la "jambe" ou de la "cuisse", il peut être "viril" ou "féminin" ; l'amateur "caresse" la bouteille avant de la "dépuceler" : on dit, en Touraine, qu'il "baise une fillette". Alors que l'ivrogne boit DU vin sans nom, le connaisseur savoure UN vin qui a un nom, allant jusqu'à une dénomination de coteau ou lieudit et même jusqu'au nom du producteur lequel, très souvent, fait toute la différence à condition de connaître "les bons". L'amateur apprécie le vin, l'ivrogne recherche l'ivresse.

Il est dommage que l'aspect mystique du vin ait été passé sous silence : n'oublions pas qu'il est cité dans l'Ancien Testament, avec Loth qui, enivré par ses deux filles restées seules avec lui dans la montagne, se fait abuser par elles pour obtenir une descendance qu'elles obtinrent, de même que Noé, ivre également après avoir planté dla vigne et bu du vin, qui se met nu devant ses propres fils. Selon un écrit apocryphe, Noé, après le Déluge, aurait reçu l'aide de Satan pour planter des ceps de vigne, lequel aurait demandé en sacrifice un mouton, un lion, un singe et un porc : pourquoi ? Satan donna l'explication : au premier verre de vin, l'homme deviendra doux et humble comme un mouton ; au second, il se sentira fort comme un lion et ne cessera de s'en vanter ; au troisième il imitera le singe, dansant tout en disant des sottises ; au quatrième, il se vautrera tel un cochon dans la fange et les immondices. Mais il occupe également une place de choix dans le Nouveau Testament puisque Jésus s'en sert à de nombreuses reprises. Tout d'abord pour son premier miracle, à Cana, en Galilée, où se déroulait un mariage auquel il avait été invité avec sa mère et ses disciples et durant lequel le vin se mit à manquer. Jésus appela les serviteurs et leur demanda de remplir d'eau six récipients pouvant contenir une centaine de litres chacun, puis de la faire goûter au maître de la cérémonie, lequel bu un vin qu'il considéra comme le meilleur de la fête, ce qui le surprit beaucoup car, en principe, on ne conservait jamais le meilleur pour la fin : le miracle était accompli. Jésus demande en outre que l'on prenne bien soin du vin et des outres appelées à le contenir, en ne plaçant jamais du vin nouveau dans des outres anciennes car ces dernières explosaraient. Et enfin, et surtout, lors de la Cène, le dernier repas pris par Jésus avec ses apôtres avant sa mort, où il se saisit d'une coupe remplie de vin et où il annnonce que ce vin est son sang, qu'il représente symboliquement le sang de l'alliance de Dieu avec les hommes et qu'il faudra perpétuer cette tradition en souvenir de lui, ce qui est fait, depuis lors, à chaque sacrifice de la Sainte Messe.

Le vocabulaire de la dégustation ne rend pas du tout compte de cette dimension religieuse puisqu'il ne sert qu'une culture du corps. Il n'empêche qu'au-delà de certaines divergences, il reste un réel plaisir des mots pour le connaisseur  qui veut parler du vin, alors que le vin mènera l'ivrogne jusqu'à un silence désolant, triste et parfois, mortel.

 

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EXPRESSIONS ET BONS MOTS RELATIFS AU VIN

 

 

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A

 

 

- ABONDANCE : l'abondance est un vin noyé d'eau, une eau rougie ; attesté au milieu du 18ème siècle, le mot s'est répandu au 19ème siècle dans le vocabulaire des collégiens à qui l'on servait cette boisson.

 

- ABREUVOIR : l'abreuvoir a désigné un verre à boire dès le 14ème siècle où l'on disait alors "abuvoir" ou "abuvroir" ; depuis le 18ème siècle, "Renouveler l'abreuvoir" c'est remettre une tournée ; au 17ème siècle, on appelait aussi abreuvoir un cabaret ;

 

- ABRI :  "En mettre un à l'abri de la pluie", c'est boire un verre, la meilleure manière d'éviter qu'il se mouille car, comme chacun le sait, l'eau est le pire ennemi du vin.

 

- ABSTEME : L'origine de ce mot remonte au 16ème siècle et était utilisé en droit canon pour caractériser une personne qui, par aversion, ne pouvait communier au vin et, de ce fait, ne pouvait se consacrer au sacerdoce ; par extension, ce mot s'applique à toute personne qui ne boit pas de vin : les musulmans, par exemple, sont abstèmes.

 

- ACCOLADE : Mot remontant au 18ème siècle ; c'est le geste de boire à la bouteille.

 

- ACESCENCE : Mot datant du 18ème siècle ; c'est la maladie qui transforme le vin en vinaigre ; un vin qui commence à aigrir est qualifié d'acescent ou piqué.

 

- ACHEVER : Mot datant du 17ème siècle ; c'est enivrer ou s'enivrer complètement.

 

- ACIDE : Avec le sucré, le salé et l'amer, l'acide est l'une des quatre saveurs élémentaires auxquelles se limitent les sensations du goût proprement dit, toutes les autres étant des sensations olfactives ou tactiles perçues dans la bouche ; le vin est composé de divers acides qui contribuent à l'harmonie de son goût et qui favorisent sa longévité : trop peu acide, le vin est qualifié de mou, trop acide, il est qualifié de vert ; pour les vins blancs, on essaie d'estimer l'équilibre entre l'acide et le moelleux, tandis que pour les vins rouges, on essaye d'estimer l'équilibre entre l'acide et le tanin ; c'est ainsi que les termes les plus usités, dans l'ordre croissant, pour exprimer le degré d'acidité d'un vin sont les suivants : mou, rond (quand l'acidité a la même intensité que le moelleux ou le tanin), frais, vif, nerveux, acidulé, vert, très vert.

 

- ÂCRE : Mot issu du latin "acer" qui signifie pointu, piquant ; il a donné naissance à deux adjectifs : aigre, pour qualifier un goût et âcre, pour qualifier une odeur, mais quand on emploie ce mot pour qualifier un goût, c'est qu'à l'aigreur s'ajoute l'amertume ou l'astringence.

 

- AILE : Avoir un coup dans l'aile ou du plomb dans l'aile signifie être ivre.

 

- ALCOOL : C'est un mot qui nous vient des Arabes, eux qui en principe n'en boivent pas, mais par l'intermédiaire des alchimistes puisque "al-kohl" est le nom de l'antimoine (minerai) pulvérisé servant encore pour le maquillage des yeux (le kohl). Le mot français alcool a d'abord désigné une poudre puis une essence obtenue par distillation ; il faut attendre le XVIIème siècle pour que le mot alcool ne s'applique plus qu'à l'esprit de vin rectifié.

 

- ALLONGER : Allonger un vin c'est le diluer avec de l'eau ; à ne pas confondre avec l'allonge d'un vin qui est sa persistance en bouche ; on dit d'un vin dont le goût se prolonge en arrière-bouche qu'il a de l'allonge.

 

- AMBRE : A partir du XVIIIème siècle, ambré désigne la couleur d'un vin blanc tirant sur le jaune doré, caractéristique des vins doux très vieux.

 

- AMBROISIE : Ce mot vient du grec ambrosia qui signifie immortel, divin, qui appartient aux dieux. contrairement à l'idée répandue, l'ambroisie n'est pas le breuvage des dieux mais leur nourriture, leur breuvage étant le nectar. La confusion des deux mots a fait donne le nom d'ambroisie à une liqueur obtenue par macération de coriandre, anis et clous de girofle dans un mélange d'eau-de-vie et de vin blanc.

 

- AME : Les poètes ont parlé de l'âme du vin; Beaudelaire, par exemple, dans son poème : "L'âme du vin" écrit : Un soir, l'âme du vin chantit dans les bouteilles ; et puis encore Théodore de Banville dans son poème : "Au fond du vin se cache une âme" s'est servi de son premier vers comme titre. Il est probable que cette expression, l'âme du vin, vienne de l'alchimie, qui utlise déjà, dans son jargon, le mot esprit et le mot corps. Arnaud de Villeneuve, alchimiste médiéval, nomme âme le ferment.

 

- AMOUR : D'un vin moelleux, velouté, on dit en Bourgogne qu'il a de l'amour. les poètes du XVème siècle, comme françois Villon, savouraient déjà un vin amoureux : l'amour de l'amateur est attribué au vin lui-même et bien lui en prend car cela doit être pour consoler le buveur de l'incompatibilité entre le vin et l'amour, "deux occupations qui s'entr'empêchent en vigeur" disait Montaigne.

 

- AMPLE : On dit d'un vin qu'il est ample lorsque ses qualités olfactives et gustatives sont intenses et nombreuses ; alors qu'il qualifie normalement une étendue, certains utilisent ce mot pour qualifier le volume du vin, en disant indifféremment qu'il est ample ou qu'il a du corps ou de la chair.

 

- AMUSANT : Un vin amusant flatte le palais ou pique la curiosité sans être un grand vin. Autrefois, une longue querelle a opposé les partisans du Bourgogne et les partisans du Champagne, les premiers considérant le Champagne comme une plaisante distraction. La Monnoye, dans un poème à la gloire du Bourgogne, tolère seulement que "Rheims vienne légèrement amuser le dessert". Un chroniqueur gastronomique du XIXème siècle écrit : "Le vin de Bourgogne seul représentait la boisson, le vin de Champagne l'amuseùent, le vin de Bordeux le régime". De plus, dans la région de Chablis, on appelle amuse-gueule un verre trop petit. En Flandre et en Artois, on nomme amusette celui qui court les débits de boissons.

 

- AMYGDALES : Se rincer, s'humecter, se nettoyer les amydgales signifie, selon une expression remontant au XIXème siècle, boire du vin ou de l'alcool. René Fallet, écrivain et scénariste du XXème siècle, proposait, dans son roman "Les Vieux de la Vieille" datant de 1958, un petit coup de rouge le matin parce que "ça décape les amygdales" et de son côté Alphonse Boudard, écrivain du XXème siècle également, proposait , dans son roman "Le Corbillard de Jules" ecrit en 1979, de boire du cognac pour "se réchauffer les amygdales".

 

- ANGES : La part des anges est la partie d'alcool qui s'évapore des fûts de Cognac pendant son vieillissement. Au XVIIème siècle, l'expression "Boire aux anges" signifiait ne plus savoir à qui boire.

 

- ANTIGEL : Marc, eau-de-vie, à boire pour se "réchauffer", en sachant pertinemment qu'en abusant, on risque de finir complètement "gelé", ce qui est paradoxal.

 

- ARRACHER : D'un alcool trop fort, on dit "qu'il arrache". Les soldats de 1918 qualifiaient "d'arrache-bide" une eau-de-vie qui était très raide.

 

- ARRANGER : En dégustation, un vin arrangé ou apprêté est un vin qui manque de naturel. A la fin du XIXème siècle, des expressions comme : s'arranger, s'arranger le nez ou être bien arrangé traduisaient, par antiphrase, le désordre de l'alcool.

 

- ARRIÈRE-BOUCHE, ARRIÈRE-GOÛT : En dégustation on appelle arrière-bouche la bonne sensation qui persiste quand on a avalé le vin alors que l'arrière-goût est une mauvaise sensation qui survient une fois qu'on a avalé le vin ; l'arrière-bouche est positive et agréable, l'arrière-goût est négatif et désagréable.

 

- ARROSER : Verbe qui a trait uniquement au caractère liquide du vin. Socrate disait, dans Le Banquet de Xénophon, que "le vin en arrosant les âmes endort les peines". On peut encore s'arroser la bouche, le gosier, les poumons, le coffre ou...l'escalier de la cave. Au XVIIIème siècle, arroser un repas ou un plat, c'était l'accompagner de vin. Arroser un café, c'est y verser de l'eau-de-vie. Enfin, on arrose également tous les grands moments de l'existence : une promotion, un mariage, un baptême, une naissance, une voiture, une maison, un diplôme... Les proches le rappellent en disant d'ailleurs : "Ça s'arrose !" signifiant : "Il faut fêter l'évènement !".

 

- ARSOUILLE : Jacques Cellard, journaliste et romancier français du XXème siècle, dans La Vie du Langage, ouvrage paru en 1979, suppose que le mot arsouille, qui signifie voyou, débauché, vient de l'anglais arshole qui veut trou du cul et qui est repris dans l'anglicisme "Pissed as arsholes" qui veut dire complètement saoul. Mais une autre origine fait dériver ce mot du latin solium qui a donné le verbe souiller puis, arsouiller qui signifie insulter et enivrer ; souillon, qui veut dire malpropre, pas soigné, sale, possède la même étymologie. Au XIXème siècle, s'arsouiller était mener une vie de débauche, s'enivrer.

 

- ARTISAN : La classification cru artisan concernait une catégorie de vins bordelais dans la grande classification de 1855 mais était ensuite tombée en désuétude. Il a fallu attendre 1989 pour qu'un Syndicat des Crus Artisans lui redonne vie et inscrive 236 vins, issus de propriétés ou de coopératives, dans sa nouvelle liste.

 

- ARTILLERIE : Au XVIème siècle, artillerie de gueule désigne des provisions ; en ancien français, attillier signifiait garnir. Au XIXème siècle, sans doute dans la lignée de l'acception canon qui voulait dire verre de vin, le mot artillerie s'est mis à signifier l'ensemble des bouteilles et des verres qui servaient à boire le vin. Les métaphores guerrières sont courantes dans les traditions populaires ; c'est ainsi qu'au Moyen Âge, des jeux dramatiques opposaient les troupes de Carême et les troupes de Carnaval, ces dernières, armées de vin et de victuailles, assommaient leurs adversaires à grands coups de tripes et de saucisses ; au XVème siècle, la poésie bachique modifie ce thème en un combat contre la soif : avec une bouteille comme cuirasse et un gobelet comme casque, l'ivrogne choisit le cliquetis des verres de préférence à celui des armes, quitte à recevoir beaucoup de coups de vin dans le corps, toujours préférables aux coups d'épée ou de couteau : il finissait généralement ivre-mort, ce qui était bien meilleur que mort tout court.

 

- ASPECT : L'aspect visuel du vin est la première étape de la dégustation. On juge la limpidité, l'intensité de la couleur et de ses nuances. Montaigne ne voulait pas des récipients de métal et n'aimait que les verres clairs et transparents pour pouvoir examiner le vin. "Qu mes yeux y tâtent aussi selon leur capacité..." écrivait-il dans ses "Essais".

 

- ASTRINGENCE : C'est un terme médical désigant la propriété qu'ont certains corps de resserrer les tisus vivants : c'est le cas du tanin qui provoque la constriction des muqueuses buccales ; un vin astringent donne une sensation de rugosité et de déssèchement.

 

- ATRAMENTAIRE : C'est un mot utilisé au XIXème siècle pour qualifier un vin à la fois très maigre et très astringent qui fait penser à de l'encre (astramentum en latin).

 

- ATTAQUE : Au XVIème siècle, attaquer signifiat commencer. Ce sens est resté dans le vocabulaire de la dégustation puisqu'on appalle attaque la première perception en bouche, suivie de l'évolution, du développement, de la finale puis de l'arrière-bouche.

 

- AVALER: Au XIIème siècle, avaler, c'est descendre rapidement. Donc, quand on descendait du vin à la cave, on disait : "Avaler du vin dans la cave". Puis, rapidement, cette image a très vite illustrée la descente rapide du vin dans le gosier. De nos jours, on oppose volontiers l'ivrogne qui avale au gourmet qui déguste. Montaigne, au XVIème siècle, faisait bien la distinction puisqu'il disait des allemands buveurs de vins : "Leur fin, c'est l'avaler plus que le goûter".

 

- AVEUGLE : La dégustation à l'aveugle ne se fait pas, comme l'expression pourrait le laisser croire, avec les yeux bandés, mais en tenant cachées toutes les indications d'une bouteille : nom du cru, année, nom du propriétaire...

 

- AVINER : Au XIIème siècle, aviner c'est fournir en vin. Au XVIème siècle, on avinait un tonneau lorsqu'on le remplissait du vin qu'il devrait ultérieurement contenir afin qu'il s'est imprègne bien. Dès le XVIIème siècle, l'ivrogne, par métaphore, est devenu un "tonneau aviné". Et ce terme s'est ensuite appliqué à tous les aspects négatifs que produit l'excès de vin : l'haleine avinée est une haleine sentant le vin acide ; la voix avinée est une voix bafouillante, incompréhensible ; la tête avinée est une tête lourde et douloureuse ; les jambes avinées sont des jambes qui ne supportent plus le corps.

 

 

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B

 

 

- BACHIQUE : C'est un mot qui s'emploie pour désigner tout ce qui relatif à Bacchus, dieu romain de la vigne et du vin. C'est ainsi que dans divers parlers régionaux, bachique signifie bizarre,anormal, lunatique, par rapprochement avec l'ivresse et la folie.

 

- BAIN : A la fin du XIXème siècle, le mot bain est employé pour la consommation excessive d'alcool. Au siècle suivant, un baigneur est un nez d'ivrogne parce qu'il est toujours plongé dans un verre. Dans le Nord et le Pas-de-Calais, on dit d'un homme complètement ivre qu'il a les yeux qui baignent dans le genièvre.

 

- BAISER : L'image du baiser que la bouche donne à une bouteille est utilisée depuis longtemps en littérature. C'est ainsi que, déjà au XVème siècle, Olivier Basselin, foulon en drap mais aussi poète normand, et grand amateur de ripailles, disait à la bouteille contenant son vin préféré dont il était amoureux : "Puisque je t'aime tant, il faut que je te baise". Cet esprit gauloisement noble est resté vivace dans les Pays de Loire puisque dans cette région, les bouteilles sont appelées des "fillettes" et qu'il est d'usage d'utiliser l'expression "déshabiller la fillette" ou "baiser la fillette"  pour dire : boire une bouteille. Il est donc de très "bon ton", pour demeurer dans le même registre, d'utiliser l'euphémlsme "rhabiller la fillette" pour demander au tavernier d'amener une autre bouteille pleine.

"Combien de temps pensez-vous qu'il faille faire la cour à la bouteille que vous voyez pour obtenir d'elle un accueil favorable ? Regardez comme elle est bonne personne : elle a failli passer tout entière sur mes lèvres dans la chaleur de son premier baiser..." (Alfred de Musset, Les Caprices de Marianne).

 

- BALLE, BALLON : Au milieu du XIXème siècle, on aime volontiers comparer l'ivresse à la rondeur : être rond traduisait fort bien, par métaphore, l'état de celui qui avait trop longtemps caressé et abusé de la dive bouteille. C'est ainsi que tout ce qui pouvait rappeler la rondeur était utilisé pour signifier l'état d'ébriété : être rond comme une balle (on dira plus tard rond comme une bille) était une expression qui s'employait pour désigner celui qui avait trop bu. Déjà, au XVIIème siècle, le mot "balle" était utilisé mais dans une autre acception puisqu'avoir "l'estomac chargé à balles" voulait dire avoir trop bu, rappel métaphorique du fusil qui était "chargé" à plein.

Vers la fin du XIXème siècle, le ballon, vase de verre sphérique utilisé en chimie, a servi à qualifier les petits verres ronds qui étaient utilisés pour servir le vin dans les bistrots ; on demandait alors un "ballon" de rouge ou un "ballon" de blanc ; de nos jours, l'expression "petit ballon" est toujours en vigueur dans les bistrots de quartiers.

 

- BAPTISER : Baptiser un vin, c'est le couper d'eau. C'est pour cela qu'un proverbe bouguignon dit : "Après le Carême, bois ton vin sans baptême".

Un curé déjeunant avec un rabbin voit ce dernier mettre de l'eau dans son vin :"Quoi, vous le baptisez ?" s'exclama le curé ; "Sûrement pas, je le coupe" rétorqua le rabbin !

Au XIXème siècle, l'expression "Etre baptisé avec une queue de morue"  signifiait être un soiffard, car, comme tout ce qui est très salé, la queue de morue entretenait la soif.

 

- BAR : A l'origine, le "Bar-room" est un endroit, en angleterre, où l'on consommait des boissons alocooliques ou alcoolisées debout au comptoir ou sur des chaises hautes ; il a été adopté en France dès la première moitié du XIXème siècle. Ce mot vient de l'ancien anglais "barre", lui-même issu de l'ancien français qui signifiait un pièce de bois ou de fer, longue et dure. On l'utilisait pour fermer de lourdes portes ou pour conserver volontairement une distance avec d'autres personnes ; c'est pouquoi cette "barre" existait dans les tavernes anglaises pour conserver une distance de sécurité entre le serveur et les clients, tout comme elle existait dans les tribunaux pour séparer le public des avocats qui eux, prenaient place derrière la "barre", ce qui est à l'origine du mot "barreau" qui désigne, de nos jours, l'ensemble des avocats rattachés à une Cour d'Appel.

 

- BARBOTER : A l'origine, barboter signifiait remuer dans l'eau ou dans la boue. En chimie, faire barboter un gaz consiste à le faire passer à l'état de bulles dans un liquide. Ce terme a été repris en dégustation car celui qui veut apprécier toutes les propriétés d'un vin en prend un peu en bouche, le conserve et y fait "barboter" un peu d'air aspiré à travers les lèvres à peine ouvertes, libérant ainsi les arômes pour une perception rétro-olfactive. Le petit "gargouillis" produit par cette opération est considéré comme totalement déplacé et inconvenant par les profanes non initiés au rituel de la dégustation, mais il est une espèce de "mot de passe" pour les amoureux du vin qui se reconnaissent comme tels aux premières "notes" de ce "chant sans parole"...

 

- BARBOUILLER : Au XVIIIème siècle, "se barbouiller", c'était s'enivrer. Les imprimeurs qui comparaient volontiers l'ivresse à l'état d'une feuille tachée d'encre ont créé plusieurs expressions équivalentes : se mâchurer, se salir le nez, se noircir.

 

- BARRE : La barre est une planche perpendiculaire aux douelles qui maintient le fond d'un tonneau. Au XVIème siècle, un proverbe disait : "Vin sous la barre bonté sépare", ce qui signifiait : "Le vin est moins bon quand il n'en reste que la moitié dans le fût". Puis, au XIXème siècle, dans l'argot de la cavalerie et des milieux hippiques, "se rafraîchir les barres" ou "se rincer les barres" signifiait "se laver les dents", donc boire car on appelle "barres" les espacements existant entre les dents d'un cheval. Enfin, au début du XXème siècle, chez les mécaniciens d'aviation, "être barré" signifiait être ivre, par prolongement des expressions "être beurré" ou "être bourré". L'expression "se barrer", toujours utilisée de nos jours, signifie partir puisque "être parti" signifie être ivre.

 

- BARRIQUE : C'est un mot d'origine gasconne qui désigne un fût de capacité variable. Née au XIXème siècle, l'expression, toujours employée de nos jours, "être plein comme une barrique" signifie être complètement  soûl. Elle a succédé à l'expression "être gros comme une barrique" qui, au XVIIIème siècle, signifiait être corpulent. En Gascogne, le mot "barriquejà" signifie rouler des barriques, boire beaucoup, courir les chais.

 

- BASCULE : Au XXème siècle, "basculer un godet" signifiait et signifie toujours "boire un verre" par évocation du geste, mais qui le fait trop finit par "enchausser des souliers à bascule" car même debout et droit, il entame un mouvement en arrière qui le ramène en avant et ainsi de suite.

 

- BEAUJOLAIS : Le plus populaire des vins a un nom qui se prête volontiers à un jeu de mot facile mais charmant "Beau-Joli". Le théâtre de Guignol en a tiré l'adjectif "beaujolais" qui signifie beau, merveilleux. Autrefois, les anciens qualifiaient de "vin vieux" le "vin du dimanche", un vin du Beaujolais "bouchonné", c'est-à-dire annobli par la simple présence d'un bouchon comparativement aux autres vins de bas étage de la semaine qui, eux, étaient vendus dans des bouteilles en matière plastique soit capsulées, soit vissées. On trouve encore diverses formes argotiques de l'appellation de ce vin avec les mots beaujolo, beaujolpif, beaujolpince. San Antonio ne parle-t-il d'ailleurs pas du "gros pif beaujolioff" de Béru ?

 

- BEC: Cela désigne la bouche dans diverses expressions comme : se rincer le bec, ce qui signifie boire ; avoir le bec salé, ce qui signifie avoir soif ; avoir un bec d'acier ou un bec de zinc, ce qui signifie être capable de supporter des alcools très forts.

 

- BÉNIR: il existe une vieille expression du Beaujolais qui dit : "Il en boirait autant qu'un curé peut en bénir", pour exprimer qu'il en boirait sans limite. Antoine Oudin, linguiste français du XVIIème siècle, relevait déjà, en 1640 dans son ouvrage : "Curiosités Françaises", l'expression : "Il mangerait autant qu'un évêque en pourrait bénir". Rabelais, pour sa part, nomme le vin : "L'Eau Bénite de Cave".

 

- BERNÂCHE : C'est un mot répandu dans l'Ouest et le Centre de la France qui signifie : vin nouveau encore trouble. Il possède la même racine d'origine gauloise que bran et bren qui veulent dire excréments. En latin, la lie ou les lies se nommaient faex et faecis, ce qui a donné en français le mot fèces : excréments, puis le mot défécation qui, en oenologie, signifie l'opération qui permet de séparer un vin de ses lies. En Vendée, bernasé veut dire ivre, mot formé sur bernâche ou sur les mots bren et nase : nez sale, d'où l'expression : se salir le nez pour dire être ivre.

 

- BEURRÉ : Dès le début du XXème siècle, beurré signifie ivre, mot qui semble antérieur à bourré. Ce mot vient de l'argot des imprimeurs parisiens qui, dès le début du XIXème siècle, appelaient l'encre le beurre ; ainsi, une page trop chargée d'encre était beurrée, donc beurré équivaut à noir. De là sont venues les expressions : se beurrer la gueule, prendre une bonne beurrée, être beurré comme un petit LU (qui est un "petit beurre" de la maisonLefèvre-Utile), se beurrer la tartine.

 

- BEUVERIE : C'est une débauche de boissons. Ce mot est apparu au XIIème siècle pour disparaître aux XVII et XVIIIème siècles puis pour réapparaître ensuite et être d'ailleurs toujours utilisé de nos jours.

 

- BIBERON : Avant de désigner le célèbre objet de puériculture que nous connaissons tous, au XIVème siècle, il désignait le goulot d'une bouteille, le bec d'un vase, puis au XVème siècle, il a désigné un ivrogne. On retrouve, dans le mot biberonner, qui veut dire boire plus que de raison, toujours utilisé actuellement, la référence au biberon du bébé pour faire un clin d'oeil à l'acception d'ivrogne en vogue autrefois, ce qui a aussi dérivé sur le verbe têter pour dire boire beaucoup.

 

- BIBINE: Au début du XIXème siècle, ce mot signifiait une mauvaise boisson et surtout, du mauvais vin. De nos jours, on utilise toujours ce mot mais plutôt pour qualifier une chose de mauvaise qualité : c'est de la bibine, alors que pour un mauvais vin, on utilisera plus volontiers le mot piquette.

 

- BISTOUILLE: A la fin du XIXè siècle, dans le Nord de la France, la bistouille est une rasade d'alcool dans le café. En Espagne, toujours actuellement, on parle de carajillo pour signifier que le café est arrosé avec du brandy ou du rhum.

 

- BISTRO(T) :A la fin du XIXè siècle, ce mot signifiait cabaretier avant de désigner le débit de boissons. On suppose que ce mot vient du poitevin bistraud, un commis d'auberge, qui a lui-même donné le mot bistroquet, puis troquet dans les années 1950. Une autre origine, souvent avancée, veut que le mot bistro ait été employé par les soldats cosaques, en 1814, présents à Paris suite à l'occupation russe ; ils disaient, en entrant dans les cafés : бы́стро ce qui en russe signifie : vite, car ils ne voulaient pas être surpris en train de boire de l'alcool, ce qui était rigoureusement interdit. Mais cette thèse doit être écratée pour des raisons chronologiques car la première utilisation attestée de ce mot date de 1884, soit bien après l'occupation russe du début du XIXè siècle.

 

- BITURE: Ce mot désigne l'ivresse au milieu du XIXè siècle et provient du jargon de la marine. Une biture est la distance de châine qui sépare l'ancre au fond de l'eau et le pont du bateau et, pour éviter les noeuds, la châine remontée est disposée en huit empilés sur le pont ; en jetant l'ancre, le déroulement de la chaîne se fait en huit, ce qui rappelle la démarche chaloupée de celui qui est complètement cuit.

 

- BLANC: La vinification en blanc consiste à laisser fermenter le seul jus du raisin, après avoir enlevé les peaux qui contiennent du tanin. Au Moyen Âge, on appréciait les vins blancs presque incolores et on disait : blanc comme de l'eau de roche. Pour certains, il faut boire le vin rouge après le vin blanc car il est dit : Blanc sur rouge, rien ne bouge ; rouge sur blanc, tout fout le camp ! ceci est très loin d'être vérifié, même encore aujourd'hui !

 

- BLINDER : Se blinder, c'est s'enivrer à la fin du XIXè siècle.

 

- BOIS : L'expression "goût de bois" a deux acceptions contradictoires. Certains l'utilisent pur désigner le mauvais goût transmis par des fûts défectueux, ce qu'on appelle aussi "goût de fût" ; pour d'autres, le "goût de bois" , apprécié, est celui que donnent les fûts neufs : on dit alors que le vin et boisé. Lorsqu'on a largement abusé du vin, on dit qu'on a la "gueule de bois" c'est-à-dire la bouche aussi sèche que du bois.

 

- BONDE : La bonde, c'est le bouchon du tonneau. Dans le patois de l'Aveyron, "se bonder", c'est s'enivrer. Montaigne nous disait, dans Essais : "Le vin fait débonder les plus intimes secrets à ceux qui en ont pris outre mesure".

 

- BORDÉE : La bordée est le mouvement de flanc que fait un navire sans virer de bord. Tirer une bordée ou être en bordée signifie ainsi aller de cabaret en cabaret comme un navire qui louvoie.

 

- BOSSE : Se donner une bosse, c'est faire ripaille par assimilation avec la métaphore d'un ventre gonflé. En Rhône-Alpes, s'imbossir, c'est s'enivrer par référence au vieux mot "bosse" qui signifie tonneau. A Paris, un petit bossu est un café arrosé d'alcool. En Bretagne, "partir en bosse" c'est faire une virée de plusieurs jours dans les bistrots.

 

- BOTTE : La botte est un vieux nom de barrique en Mâconnais. De là vient l'expression "boire comme une botte". Au Canada, se "mettre en botte" c'est être ivre, expression certainement dérivée, par déformation de l'expression "être en boîte" issue du vieux mot "boîte" signifiant boisson. On dit de l'ivrogne titubant qu'il a mis les "bottes à rouleau" ou les "bottes à bascule".

 

- BOUCHE : En dégustation, par métonymie, "bouche" signifie la sensation qu'un vin laisse en bouche : on parlera d'une bouche ample,d'une bouche fermée, d'une bouche maigre... On dit d'un vin plein qu'il a "de la bouche" ou qu'il est "bien en  bouche". La première sensation est "l'attaque en bouche", la dernière est la "fin de bouche".

 

- BOUCHÉ : Le vin bouché est celui qui provient d'une bouteille fermée par un bouchon de liège ; sinon, on parlera de vin tiré directement au tonneau ou issu d'une bouteille fermée avec une capsule. Autrefois, un "vin bouché" était synonyme de "bon vin", même s'il n'en était rien, ce qui était souvent le cas : il suffisait qu'il ne provînt pas du tonneau ou qu'il ne fût pas capsulé pour qu'il soit considéré comme tel.

 

- BOUCHON : A l'origine, le mot bouchon est un faisceau de branchages ("bousche" en vieux français) qui, accroché au-dessus de la porte des cabarets, servait d'enseigne. Le mot "bouchon" a donc désigné un cabaret et de nos jours encore, à Lyon, le "bouchon" est un bistrot où l'on mange bien, où l'on boit bon et où l'on rit franc !  Au XVIIème siècle, on disait : "A bon vin, point de bouchon" ce qui ne voulait pas dire que la bouteille n'avait pas de petit cylindre conique en haut du col, mais tout simplement que le vin qui était bon n'avait pas besoin de le faire savoir par la présence d'un bouchon, d'une enseigne, en haut de la porte de l'établissement où il se buvait, l'expression étant dfevenue ensuite : "A bon vin, point d'enseigne". L'invention du bouchon de liège, tel que nous le connaissons, remonte à la fin du XVIIème siècle et est attribuée à Dom Pérignon. Si le bouchon est de mauvaise qualité, il donne alors un mauvais goût au vin : on dit qu'il est "bouchonné".

 

- BOUGNAT : C'est un marchand de vin et de charbon. Ce mot est la contraction de "charbougna", charbonnier en Auvergne, mot inventé par les parisiens vers la fin du XIXème siècle pour qualifier les nombreux auvergnats qui étaient "montés" à Paris pour ouvrir des commerce de brasseries.

 

- BOURRIQUE : Dans "La Terre", Emile Zola décrit l'anecdote d'un âne ivre, d'où l'expression "saoul comme un âne", devenue "saoul comme une bourrique", certainement par déformation de l'expression "plein comme une barrique".

 

- BOURRU : Au XVIème siècle, un vin bourru était un vin nouveau, encore doux et troublé par la "bourre", qui était sa première lie.

 

- BOUTEILLE: Chacune a sa contenance et son nom ; c'est ainsi que nous trouvons :

          * le huitième contenant 1/8ème de bouteille

          * le piccolo contenant 1/4 de bouteille

          * la chopine contenant 1/3 de bouteille

          * la fillette contenant 1/2 bouteille

          * le pot lyonnais contenant 46 centilitres

          * le magmum contenant 2 bouteilles

          * la marie-jeanne contenant 3 bouteilles

          * le réhoboam contenant 4 bouteilles

          * le mathusalem contenant 8 bouteilles

          * le salmanazar contenant 12 bouteilles

          * le balthazar contenant 16 bouteilles

          * le nabuchodonosor contenant 20 bouteilles

          * le salomon contenant 24 bouteilles

et, en Champagne uniquement :

          * le souverain contenant 35 bouteilles

          * le primat contenant 36 bouteilles

          * le mechisédech contenant 40 bouteilles

          * l'adélaïde contenant 124 bouteilles

          * le sublime contenant 200 bouteilles

 

 

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C

 

 

- CABARET: Ce mot apparaît à la fin du XIIIème siècle et provient d'un mot picard qui signifie "petite chambre". La différence entre cabaret et taverne a varié selon les époques. Au début du XVIIème siècle, Nicot nous dit qu'à la taverne on ne sert que du vin alors qu'au cabaret, on y mange en plus. Puis, à la fin du même siècle, Furetière dit exactement le contraire. Au XIXème siècle, Littré distingue le cabaret, qui n'a pas mauvaise réputation, de la taverne, où l'on se rend pour picoler à l'excès.

 

- CABOULOT : C'était le nom d'un célèbre cabaret parisien qui tenait son origine du même mot apparu au milieu du XIXème siècle ; ce mot a désigné, dans le langage franc-comtois et bressan, un réduit dans une écurie où l'on enferme un jeune animal pour le protéger des accidents.

 

- CADAVRE : Ce mot, dans son acception métaphorique toujours en usage de nos jours, est apparu au début du XXème siècle pour désigner une bouteille vide de vin, pas d'eau, car seule une bouteille contenant de l'alcool ou une boisson alcoolisée peut donner vie à une bouteille et, ainsi, la transformer en cadavre une fois vide, l'eau y demeurant totalement impuissante. 

 

- CAFÉ : C'est un endroit où l'on boit diverses boissons chaudes, telles du café, du thé, du chocolat, des tisanes, des infusions, des liqueurs accompagnées de friandises. Le premier café a été ouvert à Marseille en 1654. A Paris, Francisco Procopio dei Costelli inaugura son fameux Procope en 1686. En 1690, Furetière nomme encore ces établissements des "cabarets de café", dénomination qui sera raccourcie en "cafés" quelques années plus tard. Michelet, en 1863, se réjouissait de ce que le café avait détrôné "l'ignoble cabaret où, sous Louis XIV, venait s'encanailler la jeunesse entre les tonneaux et les filles."

 

- CANI : Ce mot signifie niche à chien en Saône et Loire. En Bourgogne et dans le Lyonnais, ce mot signifie cabaret, bistrot, depuis la fin du XIXème siècle. Comme le cabaret qui est une petite chambre, le caboulot qui est un réduit pour animal, le cani est un local exigu, renfermé et réservé... à des bêtes !

 

- CANON : Le mot latin "canna", qui signifie roseau, a donné naissance, au XVème siècle, au mot "cannelle" pour qualifier un robinet qu'on adapte à un tuyau ; puis est né le mot "canette" pour qualifier un petit vase puis une bouteille ; enfin, est né au XVIIème siècle, le mot "canon" qui a d'abord désigné un vase cylindrique à l'usage des pharmaciens avant de désigner un "verre à boire". En 1792 apparaît pour la première fois, dans le Père Duchesne, journal paru pendant la Révolution, l'expression "avaler un canon" pour signifer boire un verre.

 

- CAPITEUX : Ce mot est apparu au milieu du XVIIIème siècle pour signifier un vin fort en alcool et qui plombe la tête, tête qui, rappelons-le, se dit "caput" en latin, d'où l'origine de notre mot.

 

- CAPUCINE : On ignore pourquoi une "chemise de capucin" désigne un verre d'eau-de-vie en Poitou mais un verre de vin en Charente ! Mais, au XVIIème siècle, "boire à la capucine" signifiait boire peu car les capucins, ordre mendiant, buvaient peu, ce qui était très rare parmi les moines de l'époque. Une chanson populaire narrait d'ailleurs dans les vers suivants, les "degrés" de référence à l'alcoolisation des ordres sociaux :

Boire à la capucine, c'est boire pauvrement !

Boire à la célestine, c'est boire largement !

Boire à la jacobine, c'est chopine à chopine !

Mais boire en cordelier, c'est vider le cellier !

En revanche, au XIXème siècle, être "plein jusqu'à la troisième capucine" dépeignait l'ultime degré de l'ivresse par comparaison avec les fusils que l'on chargeait : les "capucines" étaient des anneaux de métal qui tenaient entre eux le canon et le bois d'un fusil, la dernière, la troisième, étant le plus rapprochée de la gueule !

 

- CARACTÈRE : On dit d'un vin qu'il a du caractère soit parce qu'ils possède les traits distinctifs de sa catégorie (on dit aussi alors qu'il est typé), soit parce qu'il se singularise par son originalité propre.

 

- CARAFE : Un vin "de" carafe est un vin jeune et bon marché qui n'est pas mis en bouteille et qui est tiré directement d'un tonneau ou d'un cubitainer. En revanche, un vin "en" carafe sera, tout au contraire, un vin de valeur, souvent vieux, à qui l'on aura réservé cette manipulation bénéfique : à tout seigneur, tout honneur !

 

- CARTHAGÈNE : C'est un vin de liqueur que les viticulteurs du Midi font pour leur consommation personnelle, avec du moût de raisin et de l'alcool ; il fait donc partie des mistelles, ces vins de liqueur mutés que l'on retrouve sous diverses appellations dans nos provinces françaises. Par exemple : le pommeau normand est une mistelle de moût de pommes muté au calvados ; le pineau des Charentes est une mistelle de raisins muté au cognac ; le floc de Gascogne est une mistelle de raisins mutés à l'armagnac ; le macvin franc-comtois est une mistelle de raisins muté au marc du Jura ; le ratafia, en Champagne, est une mistelle de raisins muté à la fine champagne ; le ratafia, en Bourgogne, est une mistelle de raisins muté au marc de Bourgogne ; enfin, dans le Beaujolais, le riquiqui est une mistelle de raisins muté au marc paysan.

 

- CASQUE : Le mot casque signifie, par métonymie, la tête. Au XVIIème siècle, "en avoir dans le casque", c'est avoir la cervelle brouillée (par l'alcool). Au XIXème siècle, "s'en donner dans le casque" signifie s'enivrer. Au XXème siècle, "avoir le casque enfoncé" signifie la même chose, ce qui a donné ensuite "prendre une casquette" pour dire prendre une cuite.

 

- CASSER: La casse, en œnologie, c'est l'altération d'un vin et, en un sens plus général, ont dit d'un vin qu'il est cassé lorsqu'il s'est décomposé. Au XIXème siècle, on disait qu'on "cassait le cou à une bouteille" quand on la débouchait mais, à force d'en boire, c'est le buveur qui finissait "cassé", c'est-à-dire ivre. Dès le XVIIème siècle, le "casse-tête" est un vin qui enivre en donnant la migraine ; de même que le "casse-poitrine" était l'eau-de-vie ou le "tord-boyaux" ; le XIXème siècle y ajoute le "casse-gueule" et le XXème siècle le "casse-pattes" ; au XIXème siècle, les typographes appelaient "fond de casse" les séquellees d'une cuite de la veille !

 

- CAUDALIE: Mot issu du latin "cauda" qui veut dire queue ; ce néologisme sert à mesurer la durée de persistance gustative en bouche d'un vin une fois avalé . Une caudalie équivaut à une seconde et certains vins puissants, comme un grand Sauternes ou un Château-Chalon peuvent avoir une persistance de plus de vingt caudalies.

 

- CAVE  : Ce mot, après avoir signifié fossé ou grotte, a pris, au XIIIème siècle celui du lieu souterrain où l'on entreposait le vin. Pourtant, bien qu'on parle de caves, dans bon nombre de régions d'Aquitaine ou du midi, les vins sont entreposés au cellier car les caves n'existent pas. Au XVIIème siècle, selon une belle formule poétique, "Marier la cave et le puits", c'était mettre de l'eau dans son vin !

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