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Les synthèses de Robert
4 février 2016

INVITATION A LA PHILOSOPHIE

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- INTRODUCTION

 

- PREMIERE PARTIE : POINT DE DEPART DE LA RECHERCHE PHILOSOPHIQUE

 

 - DEUXIEME PARTIE : L’INTERROGATION ET LES EXPERIENCES

 

- TROISIEME PARTIE : LES GRANDS CHAMPS PHILOSOPHIQUES

 

- QUATRIEME PARTIE : LA PHILOSOPHIE, ART DE LA REFLEXION

 

- CONCLUSION

 

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INTRODUCTION

 

 Un petit livre d’initiation à la philosophie, intitulé : « Lettre à un ami », a été rédigé par une vieille connaissance, maintenant décédée : le Père Marie-Dominique PHILIPPE, dominicain, théologien, professeur de philosophie à l’université de FRIBOURG, livre qu’il a conçu pour répondre à un ami d’enfance qu’il avait retrouvé après de nombreuses années de séparation et qui lui avait demandé, lors de leurs retrouvailles et après qu’il lui eût dit qu’il était professeur de philosophie : « C’est quoi la philosophie ? ». Plutôt que de longs discours soporifiques, il a préféré lui dédier un ouvrage au titre explicite dont je concentre uniquement ici les bases de son introduction.

 Il est bien trop tôt pour lire ce petit ouvrage dans son entier car les considérations qu’il contient, pour générales qu’elles fussent, sont déjà bien trop avancées et argumentées dans un langage qui pourrait être considéré comme abscons et qui risquerait d’écarter les jeunes profanes, en matière de philosophie, des délices exquises que procure l’étude des grands philosophes et de leur enseignement. Contentons-nous donc, pour l’heure, de faire germer les toutes premières graines : il sera toujours bien temps de récolter leurs fruits. Mais pour ce faire, il faut préalablement procéder à un long arrosage, parfois fastidieux mais absolument nécessaire, souvent passionnant et riche d’enseignements : l’étude des champs philosophiques.

Le premier acte à poser, lorsqu’on décide d’approfondir un sujet, quel qu’il soit, est de définir le concept, objet de l’étude. Que signifie donc le mot « philosophie » ? Pour le savoir, il convient, selon une démarche toujours identique et rituelle, de faire appel à l’étymologie. Ce mot est issu de l’assemblage de deux vocables grecs : le verbe « philein » qui signifie « aimer », et le substantif « sophia » qui signifie « sagesse ». La philosophie est donc l’Amour de la Sagesse. Au-delà de la simple connaissance et des nombreux savoirs, la philosophie est une démarche de réflexion sur les composantes de la connaissance universelle et des savoirs de toutes sortes, une activité intellectuelle de définition, d’analyse et de méditation sur les concepts, tels : l’amour d’amitié, le travail, la morale, la religion, la politique, le droit, l’histoire, la logique, la liberté…, la liste tendant vers l’infini…

 

 

PREMIERE PARTIE : POINT DE DEPART DE LA RECHERCHE PHILOSOPHIQUE

 

En considérant les diverses philosophies occidentales, on constate que leur point de départ n’est pas toujours le même.

En effet, pour certains philosophes, le point de départ de la philosophie est l’expérience, entendue comme l’intelligence des seules réalités : ceci existe, ceci est ; c’est la position d’ARISTOTE puis, à sa suite, de SAINT THOMAS D’AQUIN.

Pour d’autres philosophes, le point de départ de la philosophie est l’expérience intérieure de l’âme, de notre statut d’être vivant. Cette connaissance de notre intériorité nous fait découvrir notre être spirituel ; c’est la position de PLATON, puis de PLOTIN, puis de SAINT AUGUSTIN.

Pour d’autres encore, le point de départ de la philosophie est la conscience, la réflexion sur l’acte de penser : c’est la position d’OCKHAM, puis de DESCARTES (cogito ergo sum : je pense donc je suis).

Pour d’autres également, le point de départ de la philosophie est l’inspiration, l’intuition poétique, qui nous permet de découvrir, de sentir l’invisible bien présent sous le visible ; c’est la position de PARMENIDE, puis de BERGSON.

Pour d’autres enfin, le point de départ de la philosophie est l’opinion des autres, qu’il suffit de délayer ou d’approfondir ; c’est bien trop souvent la position des professeurs ! Mais ont-ils vraiment le choix de penser par eux-mêmes et de faire preuve d’originalité face aux centaines de philosophes célèbres qui les ont précédés depuis le Vème siècle avant notre ère, époque à laquelle SOCRATE, considéré comme le premier grand philosophe, a commencé à parler des concepts philosophiques et à parler seulement, puisqu’il faut bien se rappeler qu’il n’a jamais rien écrit !

Parmi ces cinq points de départ, lequel choisir ou plutôt, lequel s’impose aux autres car il faut se garder de toute subjectivité dans la démarche philosophique ? En effet, la véritable philosophie doit être sans aucun a priori ; il faut donc découvrir ce qui exclut tout choix possible (car le choix implique un aspect volontaire et, à ce simple titre, constitue déjà un a priori pour notre réelle connaissance). Cette mise en garde impose donc un seul point de départ à retenir pour l’étude de la philosophie : c’est l’expérience, fruit de l’alliance de notre intelligence et de nos sens.

Force est de constater que ce choix n’exclut pas l’expérience interne mais il permet de comprendre que cette expérience n’est pas la première dans la recherche de la réalité. En effet, pour séduisante qu’elle fût, l’expérience interne nous fait d’abord découvrir nous-mêmes et non la réalité telle qu’elle existe en dehors de nous.

Ce choix n’exclut pas non plus de s’intéresser à la conscience ; toutefois, force est là encore de constater que la conscience ne peut exister que si nous expérimentons d’abord les réalités extérieures ou intérieures à nous-mêmes : elle n’est donc pas première.

Ce choix n’exclut toujours pas l’inspiration et l’intuition, mais l’expérience s’impose à nous comme ce qui est, alors que l’inspiration, provenant de nous, ne nous met en présence que de réalités possibles et l’intuition ne nous révèle qu’une nouvelle forme, une nouvelle relation.

 Ce choix n’exclut pas enfin les opinions des autres philosophes mais ces opinions ne sont pas ce qui est : elles ne sont que le fruit de plusieurs réflexions humaines.

 

 

 

DEUXIEME PARTIE : L’INTERROGATION ET LES EXPERIENCES

 

 L’intelligence, en interrogeant, veut saisir ce qu’est la réalité expérimentée. Mais il existe diverses interrogations fondamentales. A la suite de SOCRATE, ARISTOTE a précisé les diverses formes d’interrogation :

1°) dès qu’elle a reconnu que telle réalité existe, l’intelligence cherche immédiatement à savoir ce qu’elle est : un chien, un camion, un arbre, un nuage, un électron… ; elle cherche donc à nommer, car nommer, c’est dominer ;

2°) puis, une fois découverte, l’intelligence cherche à savoir en quoi est cette réalité : en bois, en pierre, en silicone, en laine… ;

3°) l’intelligence se demande aussi d’où vient cette réalité : quelle est son origine, qui l’a faite, quel est son âge… ?

4°) l’intelligence se demande également en vue de quoi existe cette réalité : est-elle utile ? Est-elle un outil ? Est-elle naturelle… ?

5°) l’intelligence peut aussi se demander sur le modèle de quoi cette réalité a été faite.

 Voilà bien les cinq grandes interrogations, les plus fondamentales, que l’intelligence se pose dans le cadre de la recherche philosophique. Mais il en existe une dernière, d’importance : c’est « comment ? » : comment est cette réalité ? Comment a-t-elle été faite ? Comment peut-elle être conservée ? Comment peut-elle se corrompre ? Comment peut-elle être modifiée, complétée, utilisée, dominée… ?

On peut dire que le philosophe est l’homme des cinq premières questions, l’homme du : « pourquoi ? », alors que le savant est l’homme de la dernière, l’homme du : « comment ? ».

La première expérience de l’homme est celle du travail et, parallèlement, il y a celle de l’amour d’amitié. Et ces deux expériences conduisent à une troisième : celle de l’homme faisant partie d’une communauté et coopérant avec les autres. Toute la philosophie humaine, pratique, repose donc sur trois grands types d’expériences. Mais l’expérience du travail n’implique-t-elle pas celle de la matière ? L’expérience de l’amour d’amitié n’implique-t-elle pas celle du vivant ? L’expérience de la coopération avec les autres n’implique-t-elle pas celle de la finalité propre de l’homme : l’homme peut-il trouver son plein épanouissement dans la coopération ?

La personne de l’homme n’a-t-elle pas, en elle-même, quelque chose de plus grand, de plus noble, de plus spirituel que la coopération qui demeure toujours liée au bien commun ? La personne humaine n’est-elle pas ordonnée à un autre bien, au-delà d’elle-même, qui soit absolu ? Mais existe-t-il un Bien Absolu ? Le philosophe doit se poser la question même s’il n’en a pas l’expérience immédiate et même si les traditions religieuses en parlent, car il ne peut accepter les a priori de ces dernières. Le philosophe est donc obligé, à partir de l’expérience de la coopération et à partir de la question : « Qu’est-ce que l’homme ? », de revenir à ce qui est commun à toutes nos expériences et de se poser la question fondamentale suivante : « Qu’est-ce que l’être ? ».

Grâce à ces trois expériences, nous pouvons mieux saisir ce qu’est l’homme :

- par la matière, puisqu’il dispose d’un corps subissant les diverses influences de l’univers et les « irréparables outrages du temps » (Jean RACINE) ;

- par le vivant, puisqu’il dispose d’une autonomie capable de lui permettre de s’organiser et de se développer ;

- par la transcendance, puisqu’il est une personne capable de chercher la Réalité qui le dépasse, de l’adorer et de la contempler.

Toute la philosophie tend à rechercher, le plus parfaitement possible, ce qu’est l’homme. Elle permet donc de penser, puis de dire.

Parmi les très nombreuses questions que doit se poser le philosophe, nous pouvons citer à simple titre d’exemples :

  • Qu'est-ce que le réel ?
  • Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien ?
  • Qu’est-ce que la connaissance ?
  • L’esprit est-il séparé du corps ?
  • Suis-je libre de mes actions ?
  • Qu’est-ce que le beau ?
  • Que dois-je faire ?
  • …….

Emmanuel KANT, immense philosophe allemand du XVIIIème siècle, nous a dit : « On n’apprend pas la philosophie, on apprend à philosopher. » Car la philosophie n’est pas une matière en tant que telle ; c’est une attitude intellectuelle, une approche approfondie du réel, un état d’être face aux états de l’être.

Philosopher, c’est s’adonner à une réflexion systématique sur les causes, quelles qu’elles soient, et c’est aussi, par corollaire inéluctable, un amour de la connaissance, sans limite.

Parmi les illustres scientifiques qui nous ont précédés, tous n’étaient pas philosophes ; mais force est de constater que les plus grands scientifiques, tôt ou tard, ont forcément débouché sur la philosophie.

A titre d’exemples, nous citerons quelques mathématiciens célèbres qui sont devenus philosophes :

- PYTHAGORE

- ERATOSTHENE

- MARIN MERSENNE

- DESCARTES

- PASCAL

- LEIBNIZ

Il est vraiment très curieux de constater qu’après le XVIIème siècle, plus aucun mathématicien de renom n’a été en même temps philosophe. Est-ce un signe des temps ? Un constat de décadence de l’universalité de la pensée ? Que peut-on en penser ?

Autrefois, les savants, les érudits, acquéraient un savoir considéré comme universel. N’a-t-on pas vu, par exemple, François Rabelais être à la fois avocat et médecin (il a, d’ailleurs exercé à Lyon, à l’hôpital de la Commanderie des Antonins) ? Au moyen âge, les élèves étudiaient dans un premier cycle, uniquement littéraire : la rhétorique, la dialectique et la grammaire ; ce n’est qu’ensuite, dans un second cycle, uniquement scientifique, qu’ils étudiaient : l’arithmétique, la géométrie, l’astronomie et la musique. On constate que les matières scientifiques étaient obligées de faire allégeance aux matières littéraires ! Et les anciens n’avaient pas toujours tort : encore une grande leçon à ne pas oublier pour nous, leurs héritiers.

Dès lors, l’apogée de la culture générale trouve son plus grand rayonnement au XVIème siècle, avec les grands humanistes que furent, par exemple, Guillaume BUDE et ERASME DE ROTTERDAM. On constate que ces personnes connaissaient « presque rien sur presque tout », ce qui en faisait des êtres extrêmement cultivés, capables de synthèses, intelligents, alors que de nos jours, les spécialistes connaissent « presque tout sur presque rien », ce qui en fait des êtres incultes, incapables d’avoir une vue d’ensemble sur un problème et donc, très limités, à part dans leur petit domaine intellectuel.

Le scientifique acquiert un savoir qui tend vers la maîtrise absolue de la nature ; le philosophe acquiert une sagesse qui tend vers un accord serein avec la nature.

 

 

TROISIEME PARTIE : LES GRANDS CHAMPS PHILOSOPHIQUES

 

Pour pouvoir philosopher, il faut que notre ignorance engendre, par vertu, notre désir de connaître et ce, dans tous les domaines, sans exception. Chacun de nous est donc un mélange d’ignorance et de connaissance et philosopher, c’est vouloir réduire le champ de notre ignorance en élargissant celui de notre connaissance, à chaque instant, chaque jour. Nous sommes donc le point de jonction entre le fini et l’infini, entre le temps et l’éternité, entre l’imparfait et le parfait, entre l’ombre et la lumière… A nous de savoir vers quel côté nous voulons nous tourner.

La philosophie est un pont qui doit permettre à un individu de partir de l’état d’être humain pour tendre vers l’état d’être divin (au sens d’Etre Parfait) dans le cadre d’une quête longue et jamais terminée que l’on qualifie de Sagesse.

La philosophie est donc une réflexion sur toutes les formes de l’expérience humaine (Karl JASPERS). Or, à partir de cette définition, nous pouvons tenter de trouver quels peuvent être les différents champs de cette expérience humaine :

 

1°) l’expérience sociale et politique

Nous venons tous au monde dans un milieu de relations complexes régies par une organisation reposant sur des règles. Ce niveau d’expérience humaine, c’est la philosophie politique qui étudie la place et le rôle de l’homme dans toutes les structures organisées auxquelles il appartient dès sa naissance : famille au sens étroit (père, mère, frères, sœurs) ; famille au sens large (grands-parents, oncles, tantes, cousins, cousines…) ; relations amicales des parents ; relations amicales de lui-même…, ou auxquelles il va être obligé d’appartenir par la suite : école, collège, lycée, associations sportives, musicales, de danse, de théâtre…, entreprise… Lorsqu’on étudie la philosophie politique, nous ne faisons donc surtout pas de « la politique », nous nous adonnons seulement à une réflexion sur la politique. C’est la démarche intellectuelle à laquelle s’est livré Jean-Jacques ROUSSEAU lorsqu’il a rédigé son célèbre ouvrage : le Contrat Social.

Mais l’ensemble des relations complexes régies par de nombreuses règles traduisent aussi un autre niveau d’expérience humaine : c’est la philosophie du droit qui circonscrit le champ de liberté de l’homme en lui imposant des obligations, et donc fait naître une notion d’ordre public et une notion de justice. Lorsqu’on étudie la philosophie du droit, nous ne faisons surtout pas de droit au sens pratique (les praticiens sont là pour ça : notaires, avocats, huissiers…), nous nous adonnons seulement à une réflexion sur le droit. C’est une approche intellectuelle qui a été très chère à ARISTOTE et que l’on trouve dans bon nombre de ses ouvrages.

 

2°) l’expérience empirique

Ce que l’on nomme expérience n’a lieu qu’à partir de nos sens, de notre propre perception. Ce champ d’expérience s’appelle, en philosophie, l’expérience empirique et dans ce champ, une place particulière doit être faite à l’expérience scientifique appelée communément l’expérimentation. La partie de la philosophie qui s’occupe spécifiquement de ce genre d’expérience (scientifique) s’appelle l’épistémologie ou philosophie des sciences. Lorsqu’on étudie l’épistémologie, nous ne faisons surtout pas des sciences au sens expérimental (les praticiens sont là pour ça : chimistes, physiciens, astronomes, biologistes…), nous nous adonnons seulement à une réflexion sur les sciences. C’est une approche intellectuelle que l’on retrouve chez René DESCARTES dans son ouvrage : le Discours de la Méthode, ou encore chez Emmanuel KANT dans son ouvrage : Critique de la Raison Pure.

 

3°) l’expérience esthétique

L’expérience empirique (partant de nos sens) peut générer une émotion lorsqu’elle nous offre le visage de la beauté. L’écoute d’une musique est bien plus que la perception de bruits ou de sons : on « entend » un bruit alors qu’on « écoute » une musique. L’instant ou l’esprit est en présence de la beauté vibrante donne lieu à une expérience spécifique qui est l’expérience esthétique. On appelle esthétique la partie de la philosophie qui traite de l’expérience du beau. Lorsqu’on étudie l’esthétique, nous ne faisons surtout pas de l’art au sens pratique (les artistes sont là pour ça : musiciens, peintres, danseurs, sculpteurs…), nous nous adonnons seulement à une réflexion sur l’art. C’est une approche intellectuelle que l’on retrouve chez Georg Wilhelm Friedrich HEGEL dans sa compilation de cours appelée : « Esthétique ou philosophie de l’Art », ou encore chez PLATON dans un de ses dialogues : « Ion ».

 

4°) l’expérience morale

Nous sommes aussi capables de faire l’expérience du bien et du mal ; c’est une forme d’expérience très différente de la simple expérience empirique à base de sens, ou encore de l’expérience esthétique à base de beauté. Le domaine de cette expérience est appelé philosophie morale et tente de répondre à la question suivante : que dois-je faire ? Lorsqu’on étudie la morale, nous ne faisons surtout pas de « morale » (nous ne sommes pas des moralisateurs !), nous nous adonnons seulement à une réflexion sur la morale. Dans cette étude, la philosophie ne cherche pas à juger, en absolvant ou en condamnant, elle cherche à comprendre. C’est un domaine de réflexion particulièrement brûlant mais d’importance car chacun croit posséder sa propre morale : or, il ne doit pas en être ainsi sur un plan philosophique. Certains grands auteurs s’y sont penchés : Emmanuel KANT, dans son ouvrage intitulé : « Les Fondements de la Métaphysique des Mœurs », et Henri BERGSON dans son ouvrage intitulé : « Les Deux Sources de la Morale et de la Religion », pour n’en citer que deux car la liste pourrait être très longue.

 

5°) l’expérience psychologique

Dans notre vécu, nous sommes soumis à diverses expériences telles : le désir, la peur, la mort (des autres, bien sûr !), la violence… La partie de la philosophie qui s’intéresse a l’expérience vécue de la conscience s’appelle la psychologie rationnelle. Lorsqu’on étudie la psychologie rationnelle, nous ne faisons surtout pas de psychologie (les psychologues thérapeutes sont là pour ça), nous nous adonnons seulement à une réflexion sur la psychologie. C’est un domaine de réflexion qui s’intéresse à la conscience, à l’esprit, à l’âme. PLATON a étudié une psychologie spirituelle dans deux de ses ouvrages : « La République » et « Phédon ».

 

6°) l’expérience intellectuelle

Nous avons également un vécu de notre pensée au travers d’expériences intellectuelles. L’évidence, la contradiction, la logique, le paradoxe, le vrai, le faux, la métaphysique… sont autant d’expériences vécues par notre esprit à l’égard des idées. Si l’on applique ces différents concepts aux calculs, nous nous trouvons alors en présence de la philosophie des mathématiques dans laquelle la logique joue un rôle essentiel. Le premier philosophe a s’être penché sur l’étude de la logique est ARISTOTE ; puis, l’étude de la connaissance et de la certitude ont été approfondies par Emmanuel KANT dans son ouvrage : « Critique de la Raison Pure ».

 

7°) l’expérience spirituelle

L’être humain a également des expériences de nature religieuse. On appelle spiritualité la somme des expériences intérieures de l’homme. Dans la mesure où il existe une expérience spirituelle, même si elle est peu commune, elle a néanmoins droit de cité en philosophie puisqu’elle est une expérience. Toutefois, le philosophe ne pourra pas attribuer à la foi le même rôle que lui reconnaîtra un théologien.

 

 

 QUATRIEME PARTIE : LA PHILOSOPHIE, ART DE LA REFLEXION

 

Toutes les « matières » peuvent s’enseigner sans problème, précisément parce qu’elles possèdent toutes un rapport « palpable » avec le réel (d’où leur nom de « matières » !). On en connaît le contenu circonscrit : la biologie, la botanique, l’histoire, la géographie, la chimie, la physique, les mathématiques… et, au moyen de « techniques » appropriées à chacune, on peut acquérir un « savoir » spécialisé. Mais peut-on en dire autant de la philosophie, puisque nous avons vu que la philosophie n’est pas un savoir ? Est-ce à dire, pour autant, que la philosophie ne supporte pas de « méthode » et ne s’apprend pas ?

Souvenons-nous bien, comme l’a précisé Emmanuel KANT, que l’on n’apprend pas la philosophie comme on apprend l’histoire ou la géographie : on ne peut qu’apprendre à philosopher, ce qui est très différent. On ne peut pas réciter une leçon de philosophie comme on réciterait une leçon de botanique car la philosophie implique un engagement total de l’individu dans les interrogations qu’on lui pose ou qu’il se pose : seul lui et personne d’autre ne possède la réponse ; c’est à l’intérieur de lui-même que l’individu va chercher la ou les réponses qui sont inscrites nulle part. La méthode philosophique, si tant est qu’elle existe, pourrait être concentrée en une formule : apprendre à penser par soi-même. La qualité de la ou des réponses repose donc uniquement sur la qualité de l’argumentation, qui repose elle-même sur la qualité de la construction intellectuelle qui l’échafaude, qui lui sert de squelette et sur laquelle elle repose entièrement.

Tout comme on apprend à marcher en marchant, on apprend à philosopher en philosophant.

S’il n’existe pas de méthode philosophique à proprement parler, peut-on tenter néanmoins de trouver une méthode pour philosopher ?

Nous ne pourrons pas trouver une méthode au sens où nous l’entendons couramment, la même que celle qui nous sert pour l’apprentissage des autres « matières ». Mais nous pouvons analyser les voies de la réflexion universelle qui mènent à l’étude de toutes les formes d’expériences, champ d’investigation de la philosophie (ce qui nous permet de dire que ce champ d’investigation est infini puisque la réflexion humaine peut tout courtiser en ce bas-monde, sans limite aucune).

La philosophie, en tant que réflexion sur toutes les formes de l’expérience humaine, doit tout d’abord nous permettre de « voir » la réalité dans et par l’expérience. Cette première démarche nous permet alors de la « regarder » pour « l’analyser » et pouvoir ensuite la « décrire ». La réflexion philosophique est donc une investigation, une « enquête » qui, se situant dans les choses-mêmes qu’elle étudie, produit alors une compréhension plus complète du sujet étudié. La première attitude philosophique doit être « l’éveil à ce qui est », l’éveil à « l’Etre ». Or, cette attitude nous est toute personnelle car personne ne pourra être éveillé à notre place, ne pourra comprendre à notre place. Le discours philosophique ou l’écrit philosophique consistera donc à rapporter ce que nous aurons personnellement « vu » et à l’expliciter. Nous sommes donc philosophes lorsque nous sommes des observateurs lucides, le plus neutre possible, dépouillé ne nos sens toujours déformants car réducteurs et subjectifs, sinon comment faire la part des choses ? Comment connaître le réel de l’irréel, le vrai du faux, le laid du beau, le juste de l’inique… ?

C’est seulement en plongeant ses racines dans l’Expérience que notre pensée fait mûrir le Fruit de la Vraie Philosophie.

Le philosophe n’admire par le monde, il le questionne, il se questionne. Mais rien ne l’empêche, une fois qu’il ne « philosophe plus », de se laisser doucement bercer par les sons harmonieux d’une douce mélodie, par les fragrances merveilleuses d’un bon plat mijoté au feu de bois, par les charmes émouvants d’un corps… car, ne l’oublions jamais, un philosophe, c’est d’abord et avant tout un être humain !

La philosophie doit permettre de poser des questions et, si possible, les bonnes, car souvenons-nous bien qu’une question bien posée contient déjà, en elle-même, les prémices de la réponse.

Si l’on considère que la réalité est un tapis aux multiples couleurs et un entrelacs de formes variées, constituant sa face apparente et soumis à notre perception sensuelle, la trame de ce tapis, recouverte de couleurs et où se nouent les fils qui composent les formes, en constitue la face inapparente. Voir, regarder, c’est analyser la face apparente de la réalité ; comprendre, c’est atteindre la trame des idées qui composent la même réalité mais observée sous sa face apparente, les deux formant un Tout indivisible : traverser la face apparente pour arriver à la trame, c’est percevoir le Sens de la Réalité.

Ce que l’on appelle le « sens commun » est simplement la pensée à l’état irréfléchi, non approfondi. La philosophie permet alors de clarifier ce qui existe à l’état confus, elle n’invente pas d’idées nouvelles et n’a, d’ailleurs, jamais rien inventé, ça n’est pas son rôle. Elle prend le réel tel qu’il existe et l’observe, mais tout le réel sans ne rien laisser pour compte.

Un philosophe n’a pas « d’opinion » : il soutient des « thèses », résultat de sa propre analyse et de sa propre pensée sur un sujet donné. Les investigations du philosophe nous apportent une vision plus riche et plus profonde du réel ; il énonce des idées-forces qui sont ensuite incontournables dans l’histoire de la Pensée Humaine.

Pour philosopher, il faut donc d’abord observer le réel, pour ensuite le questionner et se questionner, dans le but de comprendre et de le comprendre, de le prendre avec soi (cum predere) pour le faire sien. L’intelligence est donc l’outil qui sert à examiner toutes les conséquences (le réel dans tous ses états) pour pouvoir remonter aux causes puis à La Cause. La Vie, c’est le rapport assimilé, vertueux et joyeux, que nous entretenons avec le monde qui nous entoure lorsque nous commençons à vouloir le comprendre. Mais il faut, pour ce faire, procéder à la chasse aux préjugés, aux confusions, aux illusions… en un mot, acquérir la Sagesse et l’aimer, but premier et ultime de la philosophie.

 

 

CONCLUSION

 

Si tant est qu’il soit possible de conclure une introduction à la philosophie, car la première n’est qu’un point de départ et la seconde possède un support infini !

La philosophie est une notion, un concept, une attitude, une manière d’être et d’appréhender le monde et sa réalité. Il est vain de vouloir la définir car son amplitude est telle qu’elle ne se laissera jamais enfermer dans la prison bien trop étroite d’une définition, d’un mot, et fort heureusement, car c’est précisément ce qui en fait tout son attrait et tout son charme, sujet de passion. On ne « fait » pas de la philosophie alors qu’on peut « faire » des maths. Car les maths partent du réel et, au moyen de la logique, arrivent à trouver la solution à un problème. En philosophie, il n’y a pas de solution à trouver car il n’y a pas de problème posé. Il ne s’agit que d’analyser la matière première qui nous environne et qui nous constitue : le réel, afin de simplement, vouloir le mieux comprendre, le « faire nôtre » pour l’aimer.

Alors, que faire ? Entreprendre des études littéraires et philosophiques ou des études scientifiques ? Opter pour la seconde voie, c’est correspondre à la « mode » actuelle où le diktat du chiffre est omniprésent, règne en maître, et « soigne » (mal !) l’angoisse de la mort, la plus importante de l’homme, en réduisant la vie à un exposé de problèmes mis sous forme d’équations auxquelles existent toujours une solution. Donc dans la mesure où tout a une solution selon ce schéma réducteur (les indigents de l’esprit ne vont-ils pas jusqu’à dire qu’il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des solutions ?), l’homme peut dormir tranquille… ! Mais n’est-ce pas oublier ou, pire encore, ignorer, que l’homme n’est certainement pas réductible à une équation, fut-elle particulièrement complexe, à plusieurs paramètres et au moyen d’algorithmes forcément limités ? Cette vision du monde selon cette seconde voie est plutôt « au ras des pâquerettes », à l’horizontale, condamnée aux abscisses ! En revanche, la première voie, la voie philosophique, prend de la hauteur, relativise, universalise pour appréhender le monde qui l’entoure ; elle ne cherche pas à le réduire à son poids, sa mesure, sa vitesse, qui ont néanmoins chacune leur importance, mais elle cherche à le replacer dans la chaîne de la vie pour examiner quelle est sa nature, d’où il vient, où il va, en s’élevant, donc en utilisant l’axe des ordonnées. Quelle belle, quelle autre, quelle haute approche du monde grâce au concours, si précieux, de l’attitude philosophique !

Cette élévation de l’esprit permet alors une descente lente mais encore plus affûtée dans le réel, souvent renouvelée : le temps apprend à gagner en Sagesse et en Amour ; telle est bien la première vertu de la philosophie (Philo Sophia = qui Aime la Sagesse)… !

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